Pour Karine Devallez, directrice associée chez FSC Executive Search, le secteur de l’industrie résiste aux vents contraires de la crise sanitaire, même si certains secteurs ont pâti du confinement et connu un arrêt brutal de leurs activités et une chute dans les carnets de commande. Qui sont les grands gagnants du Covid ? Quelles sont les opportunités d’emploi ? Le point.
Comment se porte le secteur de l’industie à l’ère du covid ?
L’industrie française semble résister à cette crise totalement inédite par sa force, son étendue et sa durée… Il faut toutefois apporter quelques nuances, car si certains secteurs ont su tirer leur épingle du jeu, d’autres en revanche ont encaissé un coup d’arrêt brutal de leurs activités, ce qui assombrit les perspectives de relance rapide. Parmi les secteurs les plus impactés par ce violent effondrement, figurent l’aéronautique/ferroviaire, la métallurgie/sidérurgie, l’automobile et les équipementiers mais aussi les sociétés de contrôle Qualité (aéronautique ou nucléaire) qui ont souffert des projets avortés. C’est le fameux Effet Domino, qui entraînent tout le monde dans une chute involontaire, soit par défaut de clients, soit par la mise en place des mesures sanitaires, soit par des coupes franches dans le budget. A l’inverse, d’autres secteurs ont su profiter de la crise et surfent sur une croissance exponentielle de leur activité.
Justement quels sont les grands gagnants du Covid-19 ?
Principalement l’industrie agroalimentaire et le secteur pharmaceutique dans son ensemble. Logiquement, la demande de produits d’entretien, d’hygiène et de gel hydroalcoolique a fortement augmenté au printemps 2020. En revanche, d’autres produits phares de l’été – anti-moustiques ou anti-poux – ont connu une chute vertigineuse de leurs ventes, faute de voyages à l’étranger ou de colonies de vacances. Mais dans l’ensemble, les indicateurs restent globalement très positifs sur le secteur pharmaceutique.
Durant la crise, la question de notre forte dépendance à la Chine et à l’Inde – concernant notamment certaines molécules et principes actifs – s’est posée de façon aigüe. Pour ou contre la relocalisation ? Les industriels s’interrogent quant à la faisabilité des projets. Récemment, Sanofi a annoncé la création d’une nouvelle unité de recherches. On observe également certains mariages entre grands groupes automobiles. Dernier en date, PSA (Peugeot-Citroën,-Opel) et FCA (Fiat-Chrysler-Jeep), qui ont donné naissance à Stellantis en juillet dernier. Et, dans le domaine ferroviaire, le Français Alstom s’est offert le canadien Bombardier Transport, et la fusion devrait être effective courant 2021. A la clé, une mutualisation des savoir-faire et des économies d’échelle.
Dans ce contexte, comment se comporte le marché de l’emploi ?
On note une certaine frilosité de la part des candidats : nombreux adoptent une attitude prudentielle et préfèrent rester à leurs postes en reportant leur envie de mobilité. Cette période d’attentisme et de prudence exacerbée se retrouvent également chez les clients : les chefs d’entreprise attendaient septembre pour établir leur feuille de route. Mais les constats tardent à venir. Nous restons optimistes car selon le dernier point de conjoncture de la Banque de France, l’activité économique est restée stable dans l’industrie en septembre, même si elle demeure en-deça du niveau normal (-5%). Pour autant, les investissements n’ont pas stoppé en France, et il y a des postes à pourvoir, dans les secteurs comme la grande distribution.
Le covid a-t-il accéléré la transformation du secteur, vers une industrie 4.0 ?
Indéniablement, le covid a bouleversé nos organisations, et particulièrement le secteur industriel. On assiste aujourd’hui à une transformation en profondeur des processus, et notamment de la supply chain. L’industrie de demain repose sur une supply chain résiliente, plus indépendante, fondée sur une pluralité de fournisseurs et sur des sites de production au plus près des territoires. C’est un secteur qui montre toute sa force et qui génère des postes d’expertise, du Business Process Owner au Business Process Manager, en passant par des spécialistes de la GPAO ou GMAO… Dans ce nouvel environnement, notre rôle, en tant que cabinet de recrutement, est réellement d’accompagner et de conseiller les entreprises. Nos clients ont tendance à rechercher le « mouton à 5 ou 6 pattes ». Ils ne recrutent jamais à l’identique, crée des « postes à tiroirs », et rajoute sans cesse de nouvelles compétences. A nous de bien affiner la demande, de classer les critères par ordre d’exigence, de bien appréhender le contexte et la finalité du poste. Du côté des candidats, nous jouons cartes sur table, en restant honnête sur les attentes du client, les missions, le niveau salarial. Pas de château en Espagne donc, mais une bâtisse solide, conforme à la réalité, pour éviter toute désillusion ou déconvenue. Les secteurs actuellement en demande ? Le secteur pharmaceutique (fonctions marketing, sites de production), l’agroalimentaire, l’industrie et le Lean Management…